Victoire en Dordogne au Trail d’Asteirus
Dimanche 17 novembre (24), 58kils, par Guillaume VIMENEY (TOP – SALOMON)
Une semaine après la Raison d’Or (46km), j’ai décidé de rechausser les Sense pour participer au Trail d’Astérius long de 58km. Ce week-end, direction la Dordogne, pour se mesurer à une région bien vallonnée et une course bien rôdée. Ma « préparation » pour la Trans Martinique aura été composée de participation à différents évènements (Marathon des Villages, Templiers, Raison d’Or, Astérius, Cross du sud-ouest). Ce n’est peut-être pas la formule idéale pour connaître un pic de forme le jour J, mais c’est ma façon de fonctionner, qui a ses avantages et ses inconvénients également.
Au cœur de la vallée de l’Isle, le circuit, d’un dénivelé positif de 1500 mètres, comptera sur de nombreuses côtes et grimpettes pour égayer notre parcours. Etant le 3e département forestier de France, la Dordogne ne manque pas de sentiers pour l’organisation de tels évènements. Je m’attends à arpenter des chemins divers. Tantôt mous et boueux en raison des conditions climatiques, il faudra aussi s’attendre à des passages sur des chemins blancs, connus pour être durs. Saint-Astier se situe dans le Périgord blanc, qui doit son nom au fait que la région regorge de plateaux de calcaire blanc. La course a la réputation d’être roulante. La plupart des montées peuvent se gravir en courant, et les descentes ne sont pas d’une grande technicité, ce qui n’est pas pour me déplaire d’ailleurs. Toujours en délicatesse avec mon pied droit, celui-ci ne devrait pas être mis à rude contribution ce week-end.
A 6h, le départ retentit dans la brume du Périgord. Glaciales, les températures me causent beaucoup d’appréhensions. J’ai décidé de bien me couvrir afin d’affronter ce froid si inhospitalier pour moi. Le mercure affiche timidement un petit degré au départ. Cela tranche avec la chaleur et la douceur des précédents mois. Le Trail commence par un tour de piste avant de déboucher sur une courte visite nocturne de la ville de Saint-Astier. Rapidement, le peloton gagne les sentiers forestiers et les côtes ardues de la vallée de l’Isle. D’emblée, une première difficulté de taille va entraver notre marche en avant. Une belle côte que je ne visualise pas aussi longue à cause de la nuit. Sans forcément le vouloir, en haut de la montée, je me retrouve seul en tête. Je n’ai pourtant pas élevé le rythme. Le balisage étant bien visible, je décide de maintenir la vitesse quitte à réaliser une longue échappée en solitaire, ce dont j’ai largement l’habitude. Esseulé aux avant-postes, je ne prends aucun risque dans la pénombre et conserve une attitude prudente et modérée. Derrière, les poursuivants ne sont pas bien loin, ce qui prouve que mon départ demeure très sage.
Les jambes ont bien récupéré de la Raison d’Or. En revanche, je suis clairement en délicatesse avec mon estomac, qui n’a pas supporté la fraicheur de la nuit périgourdine. A ce moment, j’ai conscience que je vais éprouver les pires difficultés pour m’alimenter. Pour autant, je ne suis pas inquiet. J’ai les capacités de courir quatre heures durant, sans apport énergétique. Par la suite, je suis contraint à un arrêt au stand pour un besoin naturel, mais repars toujours en pôle.
Au 15e km arrive un premier coup de théâtre, qui en appellera malheureusement d’autres. Le sentier qui n’est plus balisé débouche sur un croisement où ne paraît aucune indication d’orientation. Nous sommes perdus… Ayant une expérience riche de ce type de situation, je garde mon calme et opère un demi-tour. Je suis rejoint par 7 ou 8 poursuivants, avec lesquels on fait le choix de prendre une direction. Certains connaissent bien la région et ont déjà participé au Trail d’Astérius. Je les laisse prendre les choses en main et nous guider sur la bonne voie.
Toutefois, malgré de la persévérance, nous ne trouvons pas de rubalises. Il nous faut revenir sur nos pas. Près de 500m en contrebas, nous observons un groupe prendre le bon chemin à un virage non-signalé. Nous avons un retard minime sur le nouvel homme tête. Il n’y a donc rien de grave. Désormais, je vais rester sagement en retrait, au moins jusqu’au lever du jour. Fabrice Majek prend alors les commandes de la course et imprime l’allure. Je me place confortablement derrière lui. Les écarts se creusent rapidement et on se retrouve bientôt tous les deux. J’attends patiemment qu’il fasse jour avant de quelque peu accélérer. Dans sa roue, je me sens très en dedans.
Une fois le soleil décidé à nous réchauffer et nous éclairer de ses rayons lumineux, je prends la poudre d’escampette et file seul devant. Malgré un deuxième arrêt au stand, je ne quitte plus cette position. Je m’efforce de faire abstraction des maux de ventre pour boucler l’épreuve, avant une éventuelle défaillance liée à un manque d’énergie. Heureusement, les jambes répondent de nouveau présentes pour me porter. Aucune douleur à déclarer à ce niveau. Ouf !!
Sur le chemin, je vais à nouveau m’égarer. Les chasseurs en nombre dans les forêts traversées ne semblent pas toujours bien voir cet arrivage de coureurs aux chaussettes longues et le font savoir. Là encore, je ne cède en aucun cas à la panique ou à des émotions négatives. Je reste concentré sur la course. Au 30e km, nous arrivons au niveau du château de Chantérac, avant de parvenir au second ravitaillement. Puis, longeant un étang, nous prenons la direction du château de Segonzac. A l’instar des températures, mes sensations s’améliorent au fil des minutes.
A 18km du terme, ultime rebondissement, un passage a été victime de débalisage. Quatre chemins s’offrent à moi sans savoir lequel prendre. Quinze minutes durant, je vais réaliser des aller-retours entre ces possibilités. Finalement, c’est l’organisateur, aux aguets, venu sur les lieux, qui me tirera d’affaire en m’indiquant la bonne orientation. Cela dénote beaucoup de déontologie et d’implication de sa part. Le long de mon périple, je vais le croiser une dizaine de fois. Inquiet de perdre des coureurs dans la forêt, il se sera montré très vigilant. Les débalisages qui ont émaillés la course ne lui sont bien entendu aucunement imputables.
On se retrouve donc au 40e km avec des écarts resserrés à l’extrême, puisque mes poursuivants se trouvent tout juste derrière. Il va falloir être fort dans cette fin de course pour l’emporter. J’essaie de ne pas penser à toute l’énergie dépensée inutilement depuis le départ pour créer des écarts, qui finalement se seront révélés vains. Qu’importe, seuls m’intéressent les prochains kilomètres. Ma montre indique alors 3h40 de course. Normalement, à cette heure-là, j’aurais dû être sur le point d’en finir. De plus, les maux de ventre s’amplifient. Je m’attends à une fin de course difficile. Cependant, les poursuivants paraissent également éprouvés à ce stade de la course. Les écarts se creusent sans que j’ai l’impression d’accélérer à outrance. Une bonne chose !! Nous sortons de la forêt de la double, et traversons le charmant village de Saint-Aquilin, connu pour sa longue côte. C’est le moment de serrer les dents !!
Je m’efforce de positiver et de penser à des choses réconfortantes pour oublier l’énergie qui commence à faire défaut. Un peu plus loin, je rencontre à nouveau l’organisateur qui m’annonce l’arrivée à 8km. Waouu !! Ca fait du bien d’entendre ça. N’ayant personne dans mon sillage, je peux dérouler tranquillement jusqu’au stade de Saint-Astier. Je clôture ces 58km en 4h55, bien loin de mon pronostic de 4h15. Il faut dire que j’ai bien « jardiné », avec 8km de trop au compteur. Je ressors de cette expérience périgourdine marqué par l’effort, mais satisfait d’enchaîner une 10e victoire en 2013. De bon augure avant les Caraïbes, même s’il faudra vite récupérer.
Après notamment l’UTMB (2010), la Diagonale des Fous (2012) et la SaintéLyon (2012), ma longue histoire de désamour avec le froid se poursuit, sans que je n’y trouve pour le moment de parade. En tout cas, cela me conforte dans mon choix de course en cette fin d’année. J’ai certainement pris la bonne décision en préférant le soleil et les cocotiers des Caraïbes à la glace et la froideur des Monts du Lyonnais. Entre prairies, marécages et sous-bois, traversant âpres coteaux et sentiers escarpés le Trail d’Astérius livre une splendide visite du Périgord blanc et de son riche patrimoine. D’une extrême gentillesse, l’organisation s’investit totalement dans cette course, qui jouit d’un bon engouement régional. Au service des coureurs, les bénévoles, disséminés en grand nombre sur le parcours, ont véritablement le sens de l’accueil et du partage. A l’image du Trail du Grand-Brassac, il règne en Dordogne un bel esprit trail !
Vivement février prochain pour retrouver la région !!!
Guillaume
Bruno
20 novembre 2013 @ 10 h 55 min
Bonjour Guillaume,
A la lecture de ce C.R, il me vient 2 remarques. La première concerne la qualité de ta plume (je m’étais déjà fait cette réflexion lors d’un précédent post). La seconde, à mon sens la plus importante, concerne ta philosophie de course. Pas simple en effet de se trouver en tête d’une course rondement menée et d’être contraint de jardiner plusieurs fois après du dé-balisage sauvage. D’aucuns auraient vertement critiqué l’organisation, d’autres auraient pesté contre les bénévoles; tu choisis de les saluer les uns et les autres. Respect! Bonne récup’ et bonne fin de saison (sous le soleil!).