Le retour de l’enfant du Pays au TRAIL des Maures, par Antoine ALLONGUE, Team Outdoor Poli
Trail des Maures, 44km et 2600m D+
Par Antoine ALLONGUE (Team Outdoor Poli)
1. Retour en arrière …le Trail des Maures, c’est toute une histoire
Veille de course j’arrive à Collobrières. Pendant le week-end du Trail Des Maures ce n’est pas seulement un village mais c’est une grande famille que je rejoins et ses membres s’affairent aux derniers préparatifs : Christophe Cravéa finalise les inscriptions en lien avec notre trésorier Gregory Albarez aidés pour le jour par Stéphanie, Alyson et Michel. Fred Goujon, Doudou vérifie avec mon frère les derniers détails techniques alors que Marie et Christophe installent la tente des secours.
L’expertise de chacun a fait que cette épreuve est devenue un évènement incontournable de la vie d’un village mais aussi du Trail et de la course en Provence. Cette année près de 1200 coureurs se sont inscrits et nous ont fait confiance. Terminer la journée en voyant que tout s’est bien passé est une fierté pour les organisateurs. Cette année, je suis en retrait de l’organisation. Mon frère Romain, président de l’association et maintenant seul aux commandes, bien aidé par tous les membres du club.
Notre animateur de course préféré, Thierry Merello, gérant de la société spécialisée en communication Run Azur, ancien coureur et organisateur , aussi fin connaisseur et volubile que gourmand met déjà l’ambiance. Il prend des nouvelles de chacun, présente Thierry Charles de Running conseil Ollioules et Germain Grangier qui propose des produits de la gamme Innov 8. Tout ce petit monde s’est gentiment plié aux exigences du photographe Akunamata en présence de des coureurs locaux Julien Navarro, François Mourgues et Thomas Pigois.
2. Passer de l’autre côté de la barrière
Quoi de plus facile et évident que de se remettre dans la peau du coureur pour mieux appréhender les détails de l’organisation. J’ai donc décidé d’y participer. Courir sur mes terres, notre parcours. Le Trail des Cerfs dans les Yvelines m’avait rassuré sur mon niveau de forme. Cette course me tient évidement à coeur puisque j’ai été organisateur pendant plusieurs années. Cette fois, j’avais envie d’y participer. Je savais que ce serait dur surtout en fin de parcours. J’ai vu tellement de coureurs en baver ;-) Mais l’excitation et le plaisir de courir sur mon terrain de jeu, me seraient d’une grande utilité le moment venu, j’en suis sûr.
Pour un podium ce serait compliqué. Le Trail des Maures étant inscrit dans le challenge des Trails de Provence et avec des coureurs comme Andy Symonds, Julien Navarro, Guillaume Lenormand, Fabrice Arnaud, François Mourgues la tâche sera difficile. Je pense donc courir un bout de temps avec eux. J’ai en revanche, un objectif de temps : – 4h50. Me rapprocher des 4h45 serait une belle course. Je ne peux me baser que sur tous les coureurs que je connais bien et qui l’ont déjà fait. On verra bien !
Je rejoins tout ce monde sur la ligne de départ. Toujours sympa de retrouver autant de copains. Mais cette fois, il y a beaucoup de spectateurs et de bénévoles postés sur le parcours que je connais comme ma poche. Forcément, je l’ai tracé avec Romain et les membres du club et j’ai plusieurs fois aidé à le nettoyer, le baliser, l’ouvrir le matin avant la course. Bref, j’ai la pression ;-) et pas qu’à la Châtaigne.
3. L’envie de courir aux avant postes
Dès le départ, je décide de courir à côté d’Andy. Le rythme n’est pas très élevé dans les rues du village et nous montons la première côte du Pilon aux sensations. François, coureur local habitué aux deux autres parcours (12 et 21km) nous soufflera à l’oreille qu’il n’est jamais parti aussi lentement.
Km 2 – Descente de la Tuillière, flying Andy donne le rythme. Ça file ! Je trouve qu’il descend très vite alors que ce n’est que la 2ème fois qu’il passe ici dans ces sentiers. Il faut se concentrer pour rester à son contact. Au passage, j’accroche une souche sur le flanc gauche. Légère égratignure mais ce ne sera pas le même tarif pour Fabrice Arnaud qui va la prendre de plein fouet et perdre plusieurs minutes et tout espoir de bien figurer au classement. Mon frère Romain et mon père sont à la traversée de route et m’encouragent.
Andy enchaîne dans le petit raidillon de Pamparigouste. Je raconte quand même à Guillaume et Andy que c’est mon grand-père qui a donné ce nom à cette ligne de crête rocheuse. « C’était le nom donné par Alphonse Daudet dans les Lettres de mon moulin Pampé ri gouste ». Pays où l’on éprouve du goût et du plaisir, comme ici à Collo. Ça fait marrer Andy qui est très gourmand. Andy continue de courir, là où j’aimerais bien marcher. Il ne force vraiment pas trop, mais le fait de monter en courant partout mais renvoie un sentiment d’aisance qui me fait douter. Faut-il rester au contact ? Faut-il le laisser filer ? Je lui laisse finalement quelques longueurs pour revenir sur lui dans la descente des Vaucanes. Guillaume, François et Julien sont aussi juste là, à une dizaine de secondes.
Nous montons ensemble jusqu’au pare feu des chasseurs. Un vrai mur. Çà y est ! Fini de rire ! Il faut prendre son temps et commencer à gérer. Tout le monde marche. Et pourtant, Julien Navarro va réussir à grimper ce mur en trottinant. Tout doucement, très légèrement, il nous rattrape et nous passe pour recoller Andy puis mener la course en tête.
Km 9. Cela fait presque une heure que nous sommes partis. Nous abordons la belle difficulté du jour. La montée du GR 90 qui nous mène à ND des Anges. 3,5km et 490m D+. Un peu moins de 30 minutes de montée. Nous sommes encore au contact de Julien et Andy qui discutent ensemble. Andy, explique à Julien qu’il « compte faire un test pour le Lavaredo Ultra Trail. Pas envie de se cramer car il y a aussi le 80km du Mont blanc dans 15 jours. Juste faire du travail d’allure et accélérer dans les dernier km. » OUAIS ! ben, on va y aller mollo nous aussi ;-)
A partir de ce moment précis, 400m après le début de la montée. Julien va se mettre devant et prendre son allure. Nous nous retrouvons à trois avec Guillaume et François. Je me dis qu’on va passer un bout de temps ensemble. Au moins jusqu’au plateau des Lamberts. Restera le plus dur, surtout en fin de course. Je décide de passer devant pour grimper la montée à mon rythme. Autant profiter de chaque instant. Et puis, je peux leur faire la visite guidée. Arrivés au sommet, mon père nous annonce 1’20 de retard.
km 12. Redescente sur le vallon du Grand Vallat. Technique et piégeuse, je continue à faire la trace devant. Au passage du 1er ravito, on arrive avec un retard de 2 minutes. La montée du Pic des Sauvettes est laborieuse. Difficile de courir sans le payer plus tard. La rampe est directe entre les bruyères et les châtaigniers. On entend quelques oiseaux qui sifflent au dessus de nos têtes. On rentre peu à peu dans la forêt sauvage de la réserve biologique intégrale. François qui nous a pris quelques mètres en récupérant un sac au ravito donne l’allure. Il marche à grand pas. Finalement, le rythme sera bon mais pas forcément très soutenu. D’après les écarts Strava, nous passerons avec 6 min de retard sur Andy. +3’40 en seulement 2km. Rien que ça. La suite sera une belle et longue sortie entre copains. Après que François ait donné le rythme dans la montée du Pic des Sauvettes, je leur propose d’ouvrir le sentier en descente.
Rocher de Georges, Cros de Mouton, limite domaniale jusqu’au Plateau du Treps… François accélère un peu sur la piste du plateau du Treps. Passage en 3’40/km pour un km à 16 km/h. Nous préférons temporiser avec Guillaume et laisser partir François qui nous prend gentiment 45’’ puisqu’on choisi de s’arrêter au 2ème ravitaillement. Belle surprise au moment de partir du ravito : voir mon ami Philippe Hatat qui est remonté du col de Boulin pour venir à notre rencontre. Il est venu de Grasse pour nous voir courir, Jean-marc Nicolas et moi. Jean-Marc est kiné à Tahiti et a choisi cette période pour prendre ses congés et venir courir, ici à Collobrières, le 45km en préparation du Celestrail d’Andorre. Deux beaux témoignages d’amitié.
Je choisis cette ligne de crêtes techniques en descente pour forcer le rythme et revenir sur François. Nous lui reprendrons presque 30 secondes à la traversée de route du Col de Boulin. Nous restons en embuscade avec Guillaume Lenormand à une trentaine de secondes. Je profite de la quiétude du sentier Terre Sauvage menant vers le plateau de Lamberts et ses deux Menhirs.
A partir du Gué Du Desteou, quelques crampes me freinent et je dois laisser filer Guigui. Je suis obligé de forcer seulement sur ma jambe droite dans les montées sous peine de cramper. Je dois m’arrêter deux fois à la limite. Je repars, ralentis et m’alimente. Seul jusqu’au Laquina, je reprends Francois juste avant le sommet des Pertuades. Il est encore moins bien que moi. Il faut dire, que c’est une première pour lui sur ce genre de format. Il fait une très belle course et gagne en expérience. Je profite des deux dernières descentes que je connais vraiment très bien pour creuser l’écart sur mes poursuivants. Un régal de retrouver les pentes de mon enfance, même s’il est difficile de se laisser descendre en prenant des risques sans gêner les coureurs du 21km. Merci à eux de m’avoir laissé passer.
La traversée du village en fin de course est particulière pour moi qui ai grandit dans ces ruelles. Il faut savoir qu’avec quelques amis qui sont devenus bénévoles dans l’organisation, nous allions fabriquer des cabanes en bois sur les hauteurs et nous nous amusions à rentrer au village en faisant la course dans la descente du GR 90… et je gagnais souvent. « Le premier arrivé en bas à gagné ! ». A 10-12 ans je n’étais pas en école d’athlétisme mais je faisais déjà des éducatifs de course en descente ;-) Je franchis la ligne en 4h47 en retrouvant mes proches à l’arrivée. Mes enfants, mes parents, et mon frère Romain qui a mené de mains de maître l’organisation de cette 8ème édition, avec l’aide précieuse des membres du Trail Nature Collobrières.
Ce n’est ni la course la plus relevée ni la plus importante de ma saison de trail, mais, pour toutes les raisons évoquées précédemment, elle a une saveur vraiment particulière dans mon cœur. Franchement, venez la courir ! Vous ne le regretterez pas !