Retour sur le Trail du Morbihan par Antoine ALLONGUE
Trail du Morbihan (56), 56 kils, samedi 28 juin 2014
Antoine ALLONGUE – Team Outdoor Paris – ADIDAS
Le Trail 56 fait partie de la coupe de France de trail (TTN Long) depuis la 2ème année de sa création par la FFA en 2009. C’est donc une épreuve indiscutable du calendrier sportif même si elle est souvent boudée pour son éloignement mais surtout aussi pour son profil très plat. Avec 112m D+ sur 56km, c’est un trail très roulant avec beaucoup de pistes forestières et de route. Avec plus de 14km/h pour le vainqueur, c’est une course plus adaptée aux marathoniens qu’aux vrais trailers adeptes des sentiers techniques.
Je ne m’étais pas fixé cette course comme objectif mais quand un ami nous a proposé de passer un week-end dans le Morbihan à Port-navalo pour participer avec lui au Trail 56, ça m’a bien branché !! Une belle occasion de joindre l’utile à l’agréable en partant en famille profiter de l’océan.
Le vendredi, veille de course, nous suivons sur place le live de l’Ultra Marin (177km autour du Golfe) avec mon pote Guillaume (Vimeney) qui fait une très belle course en tête de course aux côtés de Ludovic Dilmi et Vivien Laporte. En fin d’après-midi, je pars me dégourdir les jambes sur le chemin côtier en direction de l’embarcadère où accosteront en zodiac les trois hommes de tête dans la nuit en provenance de Locmariaquer depuis l’autre rive. Je me fais même la remarque que le balisage fait sacrément défaut sur la zone puisque les balises sont espacées de 200-300m comme sur l’ensemble du parcours. Mais pour l’histoire, c’est exactement à cet endroit que s’égareront les hommes de tête et raterons le ravitaillement qui fera cruellement défaut à Guillaume. Pendant ce temps, je dors à poings fermés à quelques mètres de mon pote en perdition.
Direction Vannes pour le retrait de mon dossard le samedi matin et je tombe nez à nez avec Guillaume que je fais semblant d’écraser sur le premier passage clouté du port. La mine n’est pas celle des grands jours. Il a abandonné au 110ème km, lorsqu’arrivant en hypoglycémie au poste de pointage, les commissaires lui annonceront en plus une pénalité d’une heure pour le poste raté. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. La course était donc finie malgré le fait que la pénalité annoncée aux premiers ne sera finalement pas appliquée (sic). Je lui propose donc de monter en voiture et de venir déjeuner avec nous. La déception est grande pour lui mais on va pouvoir discuter aussi d’autre chose sur le chemin de Port-navalo et lors de notre balade en famille sur le sentier des Douaniers sous la pluie qui tombe toujours depuis ce matin.
Nous arrivons au village de Sarzeau vers 14h30 peu avant le départ avec mes amis Ronan et Guillaume. Petite bruine et le ciel est chargé. Ca pose l’ambiance. A un demie-heure du départ, je pars faire mon échauffement dans le sens inverse du parcours du 177km et du 87km et je croise évidemment quelques concurrents qui montrent logiquement des signes de fatigue. Certains sont seulement partis du port du Croizic à Arzon pour le 87km mais d’autres ont déjà près de 120km dans les jambes.
Le départ sera donné sur la place de l’église de Sarzeau. Je retrouve Romuald De Paepe qui m’informe également que Emmanuel David est présent. Je connais très bien la valeur de ces coureurs et je sais qu’il ne faudra pas essayer de s’accrocher. Par contre, je n’ai aucune idée du niveau des autres gars présents. Je pars un peu dans l’inconnu de mon état de forme puisque la dernière de course remonte au Trail des Carrières en mai. On ne va pas se mentir. Je suis à court de bornes. Je n’ai fais aucune sortie longue à pied de plus de 2h, quelques séances de vélo de 3-4h et je n’ai repris un vrai rythme d’entraînement que depuis le 1er juin environ. La naissance de ma fille a comme prévu était prioritaire. L’objectif est de faire des kilomètres en course pour préparer le Grand raid des Pyrénées 80km le 23 août.
Je compte quand même partir pour un top 5. En gardant les coureurs en ligne de mire pour commencer à faire l’effort aux alentours du km 35 en fonction des forces restantes. La musique d’ambiance de l’Ultra Marin résonne dans les rues de Sarzeau. Compte à rebours et c’est parti pour les 1500 coureurs du Trail 56.
Au bout de 3km, nous sommes déjà plus que quatre coureurs ensemble Emmanuel David, Romuald De Paepe, un autre coureur que je ne connais pas encore (Damien Douvry) et moi-même. Un cinquième coureur est parti devant en éclaireur (olivier Vergnaud) et il compte déjà quelques longueurs d’avance sur le groupe. Nous courrons à plus de 15km/h et je sais déjà que nous allons trop vite puisque Benoit Holzerny a gagné l’an passé en 4h soit 14km/h pour 56km. Je pense courir en 4h15 soit 13,5 environ.
Le parcours, d’un dénivelé de 112m + emprunte à 80% les sentiers du Tour du Golfe balisé par le conseil général du Morbihan et ne présente aucune difficulté technique. Il propose une alternance de piste large, de route et de nombreux sentiers sur le littoral du Golfe et dans les terres. La vue est souvent dégagée mais la connaissance des écarts dans notre propre course est rendue quasi impossible par le nombre de coureurs du 87km intercalés entre nous.
Je trouve d’ailleurs très dommage voire même décevant de faire partir une épreuve de la coupe de France (TTN long) derrière le passage de tous les coureurs du Raid 87km. Ces derniers utilisent le même parcours que nous mais n’ont malheureusement pas tous la même vitesse. Lorsque nous sommes partis de Sarzeau près de 1000 coureurs venaient de passer et je suis arrivé sur l’esplanade de Vannes à 19h22 en même temps que le 131ème concurrent. Soit plus de 800 coureurs doublés en 50 bornes !! Du vrai n’importe quoi !! Sans parler des marcheurs qui terminaient l’Ultra Marin avec des bâtons. Je comprends les contraintes de réduire la durée des ravitaillements pour les bénévoles et les secours en poste. Je suis moi-même organisateur du Trail des Maures. Mais pas comme ça. Je n’ai pas du tout profité du splendide paysage que nous offre le Golfe du Morbihan sans compter les nombreuses remarques nécessaires pour se frayer un chemin« Attention ! je passe à gauche ! Bonjour ! Serrez à droite ! Merci ! Courage les gars ». C’est surtout que ce n’est pas très plaisant non plus pour ces concurrents que de se faire doubler rapidement. Il aurait été si facile de nous faire partir à 13h alors que seulement 80 gars étaient déjà passés. Mais bon ! Ca a au moins un avantage : celui de nous éviter de chercher notre chemin. Il n’y a qu’à suivre le flot de coureurs devant nous.
Ravitaillement de Noyalo (km 21). Je reviens sur le 4ème sous les tentes. Petit souci avec ma poche à eau. Pas de verres sur les tables, je n’ai pas prévu le coup et donc pas de coca car je n’ai pas le temps de sortir mon matériel obligatoire. Sandrine (la femme de Romuald) m’annonce Romu à 2mn et la tête de la course à 3mn.
Je repars avec Damien et nous courrons ensemble jusqu’au km 35. Souvent en courant côte à côte et quelquefois en faisant l’effort l’un puis l’autre d’appuyer nos relais pour voir l’état de fraicheur du voisin. Beaucoup d’énergie gaspillée inutilement mais une place sur le podium est jouable et nous l’avons bien compris tous les deux. Damien me dit qu’il joue le classement du TTN. Il connaît aussi le coureur parti en tête. C’est un bon marathonien qui a couru 2h35 au Marathon de Nantes. Je lui réponds que je pense qu’il n’ira sans doute pas au bout à cette allure et que nous allons le reprendre pour deux raisons : Il n’a pas son équipement réglementaire et n’a donc pas sur lui assez d’eau ni d’aliments pour tenir, et son allure est beaucoup trop élevée pour aller jusqu’au bout. Il court avec Emmanuel David qui vaut quand même 2h20.
Je pense donc à ce podium qui est toujours jouable alors que ça fait maintenant 8km que j’occupe la 3ème place mais je commence à ne plus avoir d’eau et je gamberge en prenant mon dernier gel même si mon allure est toujours stable à plus de 13 km/h.
Au dernier pointage de « Port Ann » au km 44, Emmanuel est passé en 2h57, Romu en 3h04 et j’arrive en 3h08 mais J’aperçois Damien derrière moi à 200m. Il est toujours frais et me rattrape rapidement. Je sais que pour le podium vient de disparaître . Je préfère donc m’arrêter à côté d’une école de voile pour chercher un robinet et me recharger en eau pour mieux finir mais les jambes deviennent lourdes et il reste 12 bornes. Ca va être long. Je commence à prendre une belle hypoglycémie à partir du km 50. Mon allure passe à 10km/h mais je me force à courir. Je demande même un gel à un coureur qui n’hésite pas une seconde à me l’offrir. Toujours sympa cette solidarité entre coureurs. Je suis encore 4ème mais je marche à côté de lui quelques secondes pour récupérer. Il reste 6-7 km. Je vais encore perdre deux places et près de 12 minutes sur Damien dans l’affaire mais je finis les derniers kilomètres à une allure confortable de 11-12 km/h. Arrivé sur l’esplanade du port de Vannes, j’aperçois Guillaume qui m’attend pour m’encourager. Une meilleure gestion des ravitaillements m’aurait surement permis d’atteindre mes objectifs, mais l’essentiel est maintenant ailleurs. La confiance revient malgré la déception et je suis prêt à débuter mon cycle de montagne.
Prochains objectifs : la montée de la Rhune, Le Grand raid des Pyrénées 80 fin août et le championnat de France de Trail long en septembre dans la Drôme.
1- Emmanuel David 3h57
2- Romald De Paepe 4h07
3- Damien Douvry 4h10
4- Jean-louis Lechat 4h14
5- Stephane Renaut 4h16
6- Eddie Blanchard 4h20
7- Antoine Allongue 4h22
8- David Lamotte 4h23
9- David Chamard 4h23
10- Vincent Chapin 4h37
1- Laurence Klein 4h30
Antoine